Jean-Marie Kititwa
[ 1929 - 2000 ]Homme d'Etat
Nom
LIEU DE NAISSANCE
DATE DE NAISSANCE
DATE DE DECES
METIER / PROFESSION / TITRE
NATIONALITE
Né à Dizi vers 1917 et mort à Boma le 24 mars 1969, Joseph Kasa-Vubu fut le premier Président de la République du Congo de 1960 à 1965. Son père fut un paysan relativement riche qui avait fait stabilité dabs l’interprétariat. Kasa-Vubu est le huitième d'une famille de neuf enfants.
Vers la fin de sa formation au Grand Séminaire de Kabwe, il est jugé comme trop indépendant et trop critique pour devenir prêtre, et le père spirituel du Grand séminaire le pria de faire sa valise et de regagner son village natal. De retour au Mayombe, il devient moniteur colonial puis comptable dans une société d’exploitation forestière pour finir au service des finances du gouvernement colonial de Léopoldville.
C’est dans le dynamique de la décolonisation de l'Afrique, Kasa-Vubu trouvera enfin sa propre voie. En tant que président de l'Association de Bakongo (Abako), lui et ses partisans furent les premiers à̀ exiger l'indépendance immédiate et sans condition du Congo en réaction au plan Van Bilsen qui proposait 30 ans de préparation de l’Elite congolaise avant que ne soit envisagée. Après les premières élections locales de cécembre 1957, il est le premier bourgmestre noir de la commune de Dendale (Kasa-Vubu).
Un rassemblement politique raté de l’Abako du 4 janvier 1959 s'est rapidement transformé en soulèvement sur fond d'attaque contre les intérêts belges à Léopoldville. Des négociations ultérieures avec les forces politiques locales ont débouché à la table ronde de Bruxelles. Avec l'accession du pays à la souveraineté nationale le 30 juin 1960, Joseph Kasa-Vubu est largement élu comme premier président de la jeune République du Congo par le premier Parlement congolais, dans un contexte de crises politiques, rébellions et tentative de secession.
Il est déposé du pouvoir par un coup d'État militaire de Joseph Désiré Mobutu en novembre 1965.
Naissance, Famille et scolarité
Kasa-Vubu est né dans le village de Kuma Dizi près de Tshela dans le Mayombe. L'année de naissance de Kasa Vubu est incertaine. Au moins quatre sont mentionnés dans ses biographies : 1910, 1913, 1915 ou 1917. Cependant, celui choisi par sa fille (1915) semble être le plus probable. Son père était un paysan relativement riche et travaillait comme interprète pour des marchands ambualants de Cabinda quand il était jeune. Kasa-Vubu était le huitième membre de la famille de neuf enfants. Sa mère est décédée quand il avait quatre ans. Son père a vécu jusqu'en 1936.
Kasa-Vubu avait 12 ans lorsque fut baptisé le 31 janvier, sous le nom de Joseph, dans la mission Scheutiste de Kizu près de Tshela. Il entre en troisième année de l'école primaire à l'âge de 14 ans en 1927. Un an plus tard, il est envoyé au Petit Séminaire de Mbata-Kiela, à 50 kilomètres de Tshela. Il y acheva ses études primaires et y fit des humanités latines préparatoires au grand séminaire. En 1934, il a pour camarade de classe Joseph Malula, futur cardinal du Congo Kinshasa.
Étudiant talentueux et travailleur, Kasa-Vubu termina deuxième de sa promotion en 1936. Il feu admis au grand séminaire de Kabwe dans la province du Kasaï pour devenir prêtre catholique (3 ans de philosophie et 5 de théologie). Mais dans les dernières années de sa formation, il était considéré comme trop indépendant et trop critique pour devenir prêtre. Il fut exclu du grand-séminaire et renvoyé au Mayombe natal.
A la poursuite d’une vie satisfaisante
Renvoyé au Mayombe, Kasa-Vubu fut d’abord employé comme «commis aux écritures» à la grande mission de Kangu, située sur la route de Boma à Tshala. Afin d’améliorer ses conditions de vie, il présente l’examen de moniteur qu’il réussit et devient au début de 1941 titulaire de la classe de sixième à l’école normale de Kangu.
S'estimant insuffisamment payé pour son niveau d'instruction, il abandonne la carrière d'enseignant, et devient employé dans une société d’exploitation forestière et agricole Agrifor à Tshela. Il épouse le 10 octobre 1941 Hortense Ngoma Masunda par un mariage religieux qui eut lieu à la mission de Kangu. Le couple eut neuf enfants.
Après un an de travail à l’Agrifor, il est engagé en juin 1942, sur sa demande, à Léopoldville dans l’administration coloniale au service des finances où il devait plus tard exercer une fonction jusqu’alors réservée aux Européens. En 1956, il se voit attribué la responsabilité de la comptabilité des magasins généraux de l’Administration centrale. Kasa vubu servit pendant quinze ans dans l’administration colonial jusqu’à son élection comme bourgmestre de la commune de Dendale en décembre 1957.
Prémier pas en politique
La première intervention à caractère politique de Kasa-Vubu eut lieu dans le cadre de l’Unisco (Union des Intérêts sociaux congolais), fondée après la Seconde Guerre mondiale par Bolikango et d’autres notables congolais pour lutter contre la discrimination raciale. L’Unisco regroupait les dirigeants d’associations d’anciens élèves de Léopoldville.
Kasa-Vubu l'a réjoint en 1946 en tant que secrétaire général de l’Adapes (Association des anciens élèves des Pères de Scheut). Au sein de cette structure, il fut en 1947 un exposé intitulé « Le droit du premier occupant», dans lequel il entendait affirmer l’objectif du nationalisme kongo : évincer le colonisateur étranger, dont Kasa-Vubu avait pu constater qu’il détenait les meilleures terres au Mayombe, et contester les droits des «gens du Haut» venus de l’Equateur ou du Kasaï, sur le sol de Léopoldville.
De 1947 à 1954, Kasa-Vubu se borne à écrire des articles dans lesquels il défend les institutions traditionnelles de la société kongo : le matriarcat, la prépondérance du Clan, l’appartenance coutumière du sol, …
Président de l’Abako
Kasa Vubu s'est surtout révélé au grand public national et international en tant que dirigeant et président de l'ABAKO, Association des Bakongo, peuple qui constituait plus de 60 % de la population qui habitait la ville de Léopoldville dans les années 1950. L’Abako fut fondée en 1950 par NzezaLandu, dans le but déclaré d’«unifier, conserver et perfectionner la langue kikongo». Au-delà d’une défense de la langue, le but réel de l’Association était de réaliser l’unité des Bakongo et d’affirmer leur personnalité et leur force.
Le 21 mars 1954, Kasa Vubu il est élu président de L’Abako. Sous sa direction, l’association se développa progressivement pour se peu à peu en un parti politique vers 1955.
La première action politique de l’Abako fut la publication, le 23 août 1956, d’un manifeste en réponse au Manifeste de Conscience Africaine paru le 1er juillet de la même année. En effet, le groupe congolais de la conscience africaine (Malula, Iléo, etc.) répondit au plan Bilsen (qui demandait que l'élite congolaise soit préparée pendant 30 ans avant d'accéder à l'indépendance) par un manifeste pour l'approuver tout en demandant l'intégration progressive du peuple congolais dans la gestion de la chose publique avant l'échéance de 30 ans.
Par contre, l'ABAKO, à travers son contre-manifeste, voulait l'annulation pure et simple du plan Bilsen et l'indépendance immédiate et sans condition du Congo. Par cet acte, l'ABAKO était le premier parti-politique à demander l'indépendance du Congo. Kasa-Vubu, dont la popularité commence à déborder du cercle des membres de l’Abako, est réélu le 14 octobre 1956 à la présidence de l’Association.
1er Bourgmestre de Kasa-Vubu (Dendale)
En décembre 1957, l’Abako remporte la consultation communale de Léopoldville. Une grand part du mérite est reconnu à KasaVubu qui avait su organiser l’Association pour en faire une stucture politique et de rassemeblement des Bakongo. En 1958, il devient le premier bourgmestre noir de la commune de Dendale (aujourd’hui commune de Kasa-Vubu).
Lors de son intronisation le 20 avril 1958, Kasa-Vubu prononce un discours politique qui lui vaudra une sanction (la peine d’avertissement) de la part du gouverneur de la province. Il sera quand même dans sa position de chef du nationalisme congolais. Cependant, quelques mois plus tard, cette position sera contestée par un nouveau dirigeant, Patrice Lumumba, qui fonde et préside le Mouvement National Congolais (MNC).
Emeutes, révocation et réhabilitation
Le 4 janvier 1959, à la suite de l'interdiction par le pouvoir colonial du rassemblement politique de l'ABAKO devant être donné par Joseph Kasa-Vubu et les autres dirigeants de l'ABAKO, de graves émeutes éclatent à Léopoldville. Les partisans de l'ABAKO revenant du lieu de l'évènement annulé, pour manifester leur colère, s'attaquent aux édifices coloniaux, commerces et magasins appartenant à des Blancs. Il s'est ensuivi un affrontement sanglant avec les forces de l'ordre lourdement armées. Ces émeutes font plusieurs morts et blessés, particulièrement du côté des manifestants.
Kasa-Vubu est révoqué le lendemain de ses fonctions de bourgmestre. Lui et les autres dirigeants de l'ABAKO (Daniel Kanza, Gaston Diomi Ndongala, Pindi, etc.) sont recherchés et certains d'entre eux arrêtés le 8 janvier après s’être caché quelques jours. Mais à la suite de la pression populaire et politique de plus en plus montante et à l’intervention du Ministre du Congo, Van Hemelrijck, ils sont vite libérés le 14 mars. Kasa-Vubu est invité en Belgique où il reste jusqu’en mai. Il est rétabli dans ses fonctions de bourgmestre.
Mais au cours de l’année 1959, l’implantation à l’échelle nationale des partis nationalistes et l’ascension d’autres dirigeants, entament l’audience de l’Abako et de son président. Le boycott des élections communales et territoriales de décembre 1959 et les prises de positions politiques radicales vont continuer à effriter le crédit de l’Abako parmi le courant nationaliste. Le 2 janvier 1960, Kasa-Vubu transmet ses pouvoirs de bourgmestre de Dendale à son successeur.
La table ronde de Bruxelles
La Belgique décide d’ouvrir des négociations avec les forces politiques locales, négociations pour une indépendance immédiate, qu’on nommera la « Table ronde de Bruxelles ».
La conférence s’ouvre le 20 janvier 1960. Il y préside la délégation du Cartel des partis nationalistes jusqu’au jour de l’arrivée de Lumumba, le 25 janvier. En effet, lors de ces assises, Joseph Kasa-Vubu s'est particulièrement illustré en demandant la libération immédiate de Patrice Lumumba et sa participation à la Table ronde, menaçant de quitter lui-même la Table ronde. Lumumba était incarcéré à la prison de Stanleyville pour un prétendu détournement des fonds de la société qui l'employait au profit de son parti politique. Grâce à son intervention, Lumumba a été libéré et a rejoint la Table ronde.
Kasa-Vubu quitte la conférence dans des conditions ambiguës et n’y reprend sa place que deux semaines plus tard, perdant ainsi une grande partie de son prestige, du moins à l’extérieur du Bas-Congo. Les nationalistes lui reprochent ses thèses fédéralistes; les modérés son intransigeance à l’égard de la puissance coloniale. Les cadres dirigeants de l’Abako restés au Congo sous la conduite de Vital Moanda et les Bakongo, le soutiennent contre l’aile Kanza, crée et annoncée le 4 mars par Kanza lui-même.
Premier Président de la jeune République du Congo
Les élections de mai 1960 donnent la victoire aux partis nationalistes que Lumumba rassemble autour du MNC. L’Abako, déjà exclue de l’administration de la ville de Léopoldville, se retrouve dans une position de minorité dans la province. Kasa-Vubu, à la tête d’un cartel de modérés, parvient au dernier moment à se faire élire comme Chef de l’Etat par les deux chambres réunies par cent cinquante-neuf voix sur deux cent seize, face à Bolikango.
Il dirige le pays du 30 juin 1960 au 24 novembre 1965, dans un contexte de crises politiques, rébellions et tentatives de sécession. Il garde aujourd'hui en République démocratique du Congo une image généralement positive, et reste dans les mémoires comme un homme politique soucieux d'honnêteté et de transparence.
Les mutineries de la Force publique de juillet 1960 ébranlent l’Etat congolais. Au début, Kasa-Vubu s’associe à l’action de son premier ministre Lumumba pour tenter de sauver la situation, mais à partir de début août des divergences apparaissent entre les deux dirigeants. Quelques mois après, un conflit ouvert éclata entre Joseph Kasa-Vubu et le Premier ministre Patrice Lumumba.
Kasa-Vubu redoute de plus en plus le radicalisme de Lumumba dont il désapprouve l’intervention militaire au Kasaï et l’appel à l’aide à l’Union soviétique. Le 5 septembre il révoque son premier ministre et charge Iléo, président du Sénat, de former un nouveau gouvernement. Lumumba, s’appuyant sur le parlement, proclame à son tour la déchéance du Chef de l’Etat et ouvre la deuxième phase de la crise congolaise.
Celle-ci est aggravée le 14 septembre par l’intervention du colonel Mobutu, qui neutralise les deux adversaires et les deux gouvernements en présence et installe un nouvel exécutif, le Collège des commissaires généraux. Après quelques jours d’hésitations et de négociations mouvementées, Kasa-Vubu, qui a la confiance du Collège des commissaires, et Mobutu, que l’intransigeance de Lumumba effraie, font alliance. Kasa-Vubu apporte à Mobutu et au Collège la légitimité qui leur fait défaut.
L’Assemblée générale des Nations Unies à New York, après des débats d’une grande violence, admet le 24 novembre 1960 la délégation congolaise conduite par Kasa-Vubu. C’est une victoire importante pour le Chef de l’Etat, mais aussi pour le Collège des commissaires et pour le colonel Mobutu. Avec l’appui de l’ONU, il atteint ce dernier objectif en août 1961. Le gouvernement Adoula est formé pour trois ans et la collaboration entre le Chef de l’Etat et son premier ministre est totale: mais ce n’est qu’en janvier 1963 que le premier objectif est atteint avec la fin de la sécession du Katanga et l’exil de son président Moïse Tshombe.
Kasa-Vubu soutient à partir de 1962 la mise en place d’une structure fédérale et la création de nouvelles provinces. Après un semblant d’accalmie observé en 1963, les rébellions qui secouèrent le pays à partir de janvier 1964. A mesure que les Nations Unies se retirent du Congo, le pouvoir du nouvel Etat s’effrite et les rebelles gagnent du terrain. Kasa-Vubu se sépare du premier ministre Adoula le 30 juin 1964 et doit faire appel à Tshombe pour contenir la pression des rebelles qui occupent plus de la moitié du pays.
Coup d’Etat du Général Mobutu
De juillet 1964 à septembre 1965, le pouvoir du Chef de l’Etat est fort réduit et son prestige international est retombé très bas. En octobre 1965, il tente de reprendre le contrôle des institutions en révoquant le premier ministre Tshombe et en désignant un autre formateur, Evariste Kamba. Celui-ci ne parvenant pas à réunir une majorité parlementaire, le général Mobutu prend le pouvoir le 24 novembre 1965 et destitue le Chef de l’Etat le 25 novembre.
Après quelques jours de mise en résidence surveillée, Kasa-Vubu se retire dans son village d’origine au Mayombe. Il ne jouera plus aucun rôle politique.
Décès
Le 29 septembre 1966, il est proclamé sénateur à vie par le Sénat. Il meurt d’une hémorragie cérébrale et de manque de soins dans sa résidence surveillée de Kisundi à Boma, le 24 mars 1969.
Des funérailles nationales eurent lieu à Kinshasa le 26 mars. Il fut enterré à Singini près de Tsheba, terre de ses ancêtres.
Temoignage
Le professeur Van Bilsen qui fut, avec Gilis, un des rares Européens admis dans l’intimité de Kasa-Vubu, en a tracé le portrait suivant: «Kasa-Vubu était un homme taiseux, et attaché aux principes. Il fut un époux et un père attentionné, un citoyen réfléchi, prudent, soupçonneux même, à la fois courageux et timoré, et fermé à ceux qui n’appartenaient pas à son cercle d’intimes. Il n’agissait jamais de manière impétueuse ou impulsive, mais après de mûres et parfois longues réflexions et après avoir pesé tous les facteurs, tous les risques et imaginé un plan. Il était plus un prophète qu’un politicien, plus une figure nationale immuable, qu’un agitateur; un homme d’une pièce, inflexible, il n’avait rien d’un opportuniste …»
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