Joseph - Albert Malula
[ 1917 - 1989 ]Cardinal RDC - Heros National
Nom
ALIAS
LIEU DE NAISSANCE
DATE DE NAISSANCE
DATE DE DECES
METIER / PROFESSION / TITRE
NATIONALITE
Joseph-Albert Malula, né le 17 décembre 1917 à Léopoldville (actuellement Kinshasa) et mort le 14 juin 1989 à Louvain (en Belgique) est le premier cardinal congolais, archevêque de Kinshasa de 1964 à 1989. Déclaré Héros National le 30 juillet 2010.
Après avoir terminé ses études au Grand Séminaire de Kabwe, il est ordonné prêtre par Mgr Georges Six le 9 juin 1946, puis devient le premier curé noir à la paroisse Christ-Roi de Kinshasa. Le 20 septembre 1959, il est sacré évêque auxiliaire Mgr Félix Scalais, puis promis archevêque de Kinshasa par le pape Paul VI le 7 juillet 1964 et devenant ainsi le premier évêque noir de ce diocèse. Il est créé cardinal le 28 mars 1969. Il fut président du Symposium des Conférences Épiscopales d'Afrique et de Madagascar.
Après un ministère épiscopat très fructueux, il est considéré comme étant le Père du rite zaïrois, l'un des pionniers de l'africanisation du catholicisme sur l’Afrique noir, un géant de l’histoire du Zaïre et de l’Afrique, l'un des cardinaux les plus importants de l'histoire moderne de l'Église catholique en Afrique noire et bien plus.
Une vie séquencée par l’histoire
La vie de Joseph-Albert Malula peut être divisée en quatre phases importantes, rythmées par les changements historiques tant dans le pays qu’en Afrique :
Milieu familial, scolarité et vocation
Joseph Albert Malula est né dans une famille catholique. Son père Remacle, originaire de la province du Kasaï, au centre du Congo, a suivi une formation de menuisier dans la colonie scolaire de Boma, dirigée par les Frères des Écoles Chrétiennes. Sa mère, Joanne Bolumbu, Mongo d'Équateur, suivait une formation en couture au pensionnat des Sœurs de la Miséricorde à Moanda. C’est durant leurs années de formation dans la province du Bas-Congo qu’ils rencontrent et se marient, puis ils s'installent à Léopoldville. Ils ont eu huit enfants dont Joseph Malula, le cinquième.
De 1924 à 1929, Joseph Malula fréquente l'école primaire Sainte Anne, dirigée par un certain père Raphaël de la Kéthulle. Découvert par lui comme un élève doué, Joseph est envoyé au Petit Séminaire de Mbata Kiela au Bas-Congo en 1930, l'une des écoles les plus prestigieuses de l'époque fondée et dirigée par les Scheutistes. Il y entame son sixième latin ainsi que son premier apprentissage de la vie spirituelle et confirme son goût pour les études, la lecture et la musique. Très vite, il se révèle être un élève extrêmement brillant, notamment en mathématiques, en latin, en français et, surtout, en initiation philosophique.
En 1934, Malula est transférée au Séminaire de Bolongo au nord du pays. En 1937, il entame ses études postsecondaires au grand séminaire du Christ-Roi à Kabwe, dans le centre du pays. Il y étudie la philosophie pendant trois ans et la théologie pendant cinq ans.
Durant ces années, il réfléchit régulièrement et profondément sur le rapport entre l`Église et la vie d`un peuple, entre le rôle du prêtre dans la vie d`un peuple ou encore celle sur le fait colonial. Il se plonge dans les écrits philosophiques des pères de l’Église (Augustin, Cyprien, Pascal, Saint Thomas d'Aquin) d’où il y apprend la rigueur, l’esprit de la méthode et le sens élevé de l’analyse critique.
Joseph Malula achève ses études de théologie en 1944, fait son stage d’une année au petit séminaire de Bokoro. Il est ordonné prêtre le 9 juin 1946 au stade Reine-Astrid de Léopoldville en compagnie de son condisciple et ami, Eugène Moke.
1946 à 1959 : Les premières années de ministère
Après son ordination, Joseph Malula est professeur au petit séminaire de Bokoro. Quelques mois après cette première affectation, il est nommé par Mgr Scalais, vicaire apostolique de Léopoldville, à la paroisse Saint-Pierre, puis curé de la paroisse du Christ-Roi et, plus tard, de la période de Saint-Pierre : deux des plus anciennes et plus grandes paroisses de Léopoldville ; faisant ainsi de lui le le premier prêtre local à exercer la fonction de curé.
Sa vigueur dans la prédication, son éloquence, son zèle apostolique, sa capacité de gouvernance, sa vision de l’Église et son esprit d'équipe lui assurent une confiance sans réserve de la part de son évêque, Mgr Scalais. La réputation de Joseph suscita une telle curiosité qu'un évêque venu des régions, Mgr Jean Félix de Hemptinne (1876-1958), vicaire apostolique du Katanga, vint à Léopoldville voir ce jeune prêtre local à qui l’on avait confié une paroisse en pleine ville de Léopoldville et dont la réputation transcende les frontières de la capitale coloniale.
Durant ces premières années, qui coïncident avec l’émergence de la vague de la décolonisation, Malula devient, à Léopoldville, l’une des chevilles pensantes de la société. Sa réflexion est placée sous le signe de deux considérations critiques : le déracinement culturel, produit de la situation coloniale, et la nécessité pour l’Église missionnaire de se distancer du pouvoir colonial.
Perçu par les tout premiers jeunes intellectuels congolais comme un guide attachant, Malula est souvent sollicité pour l’animation de plusieurs mouvements chrétiens, parmi lesquels l’Action catholique, et il est fondateur de la Ligue des Évolués Catholiques du Congo. En outre, il lance le Mouvement Familial Chrétien. Dès 1956, il signe avec des intellectuels catholiques un manifeste de la " conscience africaine " et prend position pour l'indépendance du Congo belge.
Dans cette conjoncture sociale et politique nouvelle, sur fond de malaise populaire, l'abbé Malula tente déjà à sa façon de réaliser la conjonction entre l’Église et l’expérience congolaise. À l’occasion de son ordination épiscopale, en 1959, il lança son programme pastoral dans cette formule lapidaire devenue célèbre : « une Église congolaise dans un État congolais ». Il s’agissait pour lui de travailler en tant que pasteur à l’incarnation effective du Christ dans la réalité congolaise.
1960 à 1972 : Malula évêque - le grand conflit Église - État
Il est nommé vicaire apostolique en 1959, peu avant l'établissement de Léopoldville en diocèse et quelques mois avant l'indépendance du Congo. oseph Malula devient archevêque de Kinshasa en 1964 et de ce fait devient le troisième évêque autochtone congolais, premier évêque congolais de Kinshasa.
En 1965, quand le général Mobutu avait pris le pouvoir, Malula avait vu cela d’un œil positif car il croyait pouvoir collaborer avec le nouveau régime pour émanciper la société congolaise. Les idées d’emancipation du peuple du général coïncidaient avec celles de Malula.
Les relations commencèrent à se refroidir entre les deux hommes quand les premiers abus du pouvoir se manifestèrent. En effet, en 1967, le “Manifeste de la N’sélé,” la charte du parti unique dans le pays fut publié. Le parti s’appelait “Mouvement Populaire de la Révolution” (MPR) et sa doctrine était le mobutisme, du nom de son fondateur. La dictature s’installait progressivement dans le pays et une constitution taillée sur mesure pour Mobutu est votée par une sorte de référendum. C’était le début de la destruction des structures sociales, économiques et politiques du pays.
Face à tout cela, les autorités catholiques furent les premières à dénoncer le laxisme et l’injustice sociale du régime. Ainsi, le 4 janvier 1969, lors d’une célébration religieuse à l’occasion de la commémoration des martyrs de l’indépendance, le Cardinal Malula critiqua-t-il, dans son homélie, l’absence de justice distributive dans la politique sociale du régime mobutiste.
Le 12 juin 1969, les autorités politiques décidèrent que le “Manifeste de la N’sélé” serait enseigné dans toutes les écoles du pays. Cette décision rencontra une résistance de la part des autorités ecclésiastiques qui voyaient en cela une politisation du système éducatif. Le projet échoua.
Le 30 juillet, suite à une manifestation estudiantine de l’Université Catholique Lovanium, le bureau politique du MPR décida la dissolution de toutes les associations de la jeunesse au profit de la Jeunesse du Mouvement Populaire de la Révolution (JMPR). Ainsi toutes les organisations des jeunes au sein de l’Église Catholique se retrouvaient-elles purement et simplement interdites.
En février 1971, Mobutu promulga une loi interdisant l’utilisation de prénoms occidentaux qui devaient être remplacés par des noms “authentiquement africains.” Chacun devait aussi se choisir un postnom (ou “nom de famille”) africain parmi les noms de ses ascendants.
En septembre 1971, le gouvernement ordonna l’étatisation de l’Université Catholique Lovanium de Kinshasa ainsi que l’Université Libre du Congo, une université protestante à Kisangani. Cette étatisation s’accompagna d’une fusion de ces deux universités avec l’université d’état de Lubumbashi, ce qui donna une nouvelle structure académique dénommée “Université Nationale du Zaïre” (UNAZA). L’étatisation de l’université catholique constitua l’apogée de l’épreuve de force du régime face à l’autorité ecclésiastique.
Pendant que certains évêques se montraient prudents et réservés, le cardinal Malula parut comme le chef de file des prélats ouvertement mécontents du régime mobutiste. Il écrivit une lettre circulaire par laquelle il mettait en garde les prêtres de sa juridiction contre l’usage des postnoms au moment du baptême. Dans le même sens, l’hebdomadaire catholique, Afrique Chrétienne, publia un article le 26 janvier 1972 déclarant : « … La question n’est pas de brandir des slogans sur notre originalité, nos valeurs… mais bien de mettre en œuvre, aux yeux du monde cette originalité et ces valeurs ».
L’hebdomadaire catholique fut saisi et frappé d’interdiction, de même que toute littérature religieuse sans distinction de confession. La crise entre les autorités catholiques et le régime mobutiste était alors à son comble. Cependant, Mobutu, bien que reconnaissant la puissance de l’Église Catholique dans le pays, répéta dans plusieurs de ses discours : “Je ne suis pas contre l’Église Catholique, je suis contre l’individu Malula.” Malula devint alors la cible privilégiée du pouvoir. Il fut l’objet de brutalités avant d’être dépossédé de sa résidence, qui devint le quartier général de la JMPR.
Le cardinal Malula refusa d’installer au grand séminaire Jean XXIII un comité de la Jeunesse du mouvement populaire de la révolution (JMPR). Ce conflit aboutit à la confiscation de la résidence du cardinal qui devint le quartier général de la JMPR. Le 11 février 1972, le cardinal Malula est contraint de s’exiler à Rome. Pendant son absence, une campagne radiodiffusée battait son plein contre “le cardinal diabolique” et “le caméléon.” Mais de Rome, il continua d’encourager les chrétiens à demeurer fermes dans la foi et enracinés dans la charité du Christ, de dénoncer leurs injustices, l’égoïsme ainsi que la conduite peu recommandable de certaines autorités politiques et des hauts cadres du pays. Ce déplaisait d’avantages aux autorités congolaises.
Le 28 juin 1972, grâce à l’intervention diplomatique et personnelle du pape Paul VI, son exil prit fin et il rentra au pays. Pour dédommager l’Église de la résidence épiscopale confisquée, l’État fit construire l’archevêché actuel.
1973 à 1989 : de l’après crise à sa mort
De retour au pays, Mgr Malula se lance dans un vaste travail de la cohésion et l’identité d’une Église particulière et d'une communauté chrétienne.
Il organise les ministères dans son diocèse avec l’instauration d’un ministère pour laïques (appelés Bakambi), il s’engange dans la redéfinition de l’Église à partir de petites communautés chrétiennes, dans la promotion et la mise en œuvre d’une liturgie chrétienne d’expression africaine, qui sera appélé « rite zaïrois » ou « rite congolais », dans l’implication de l’Église dans des questions touchant le développement et la justice sociale.
Animé par une éthique de la conviction accompagnée par une éthique de la responsabilité, le cardinal Malula assume les fonctions du vice-président de la Conférence nationale des évêques du Congo et de président du Symposium des Conférences Épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM). Il est nommé membre de la Commission liturgique préparatoire du concile Vatican II (1962-1965) et y prend une part active en contribuant grandement à la rédaction du fameux document Sacrosanctum Concilium, sur la liturgie. Entre les différentes sessions du Concile, il informait régulièrement les fidèles de l’Église de Léopoldville sur l’évolution des travaux.
En plus, il copréside le Synode des évêques de 1985, en participant comme membre dans plusieurs commissions de ces synodes.
Au debut de l'année 1989, peu avant sa mort, il était avancé dans son projet de la fondation d’un institut africain de missiologie.
Décès
Le cardinal Joseph-Albert Malula, archevêque de Kinshasa, est décédé, mercredi 14 juin 1989, à la clinique de l'université de Louvain, des suites d'une tumeur au cerveau. Il était âgé de soixante-douze ans. Mais beaucoup croient qu’il a été empoisonné par des émissaires de Mobutu pour des raisons politiques.
Héritage :
«Le cardinal a été l’un des premiers théologiens africains à revendiquer l’inculturation des valeurs chrétiennes. Il fut un excellent écrivain, un homme fortement engagé dans le débat politique, un lecteur passionné, un grand compositeur de musique (il a composé la majorité des chants du rite congolais), un amant des arts et un admirateur des valeurs culturelles africaines comme le mariage», a rappelé Mgr Monsengwo.
Selon le Père Luyeye, l’œuvre pastorale du cardinal Malula est très riche et elle couvre tous les domaines de la vie ecclésiale et sociale. Elle est caractérisée entre autres, par son implication dans le processus de l’indépendance du Congo, sa participation au débat relatif à la reconnaissance de la théologie africaine, son souci pour la famille chrétienne, pour la formation des prêtres, la création d’une communauté religieuse féminine dont le style de vie est encore à ce jour le point de référence en Afrique, l’organisation pastorale de l’archidiocèse de Kinshasa (trois prêtres en 1960, une centaine en 1989), la création de lieux de formation pour prêtres et agents laïques de pastorale, la convocation d’un synode diocésain qui eut un retentissement sans précédent à travers toute l’Afrique, ses participations actives aux débats des Semaines théologiques et philosophiques de la Faculté catholique de Kinshasa, ses prises de positions en matière de justice sociale et en faveur des droits des femmes, des hommes et des pauvres.
Sur le plan liturgique, le cardinal Malula a été considéré comme le « père du rite zaïrois », le pionnier par excellence de l’africanisation du christianisme sur le continent noir.
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